Roger Scruton nous a quittés hier. Il était membre du comité de patronage de la Fondation du Pont-Neuf, tout comme Chantal Delsol qui rappelle, dans le texte d’hommage ci-dessous, tout ce que nous devons au philosophe britannique qui a porté haut les couleurs du conservatisme.
“Dans le pays-berceau du clivage entre conservateurs et progressistes, la vie de Roger Scruton traduit bien l’histoire récente de ce clivage. Issu d’une famille modeste de syndicalistes de la gauche dure, il a saisi le paradoxe des ouvriers marxistes en ce XX° siècle : adeptes d’une idéologie universaliste, ils sont eux-mêmes profondément enracinés dans leurs communautés d’appartenance. C’est bien ce paradoxe qui fait éclater le marxisme et produit les nouveaux clivages. Scruton devient naturellement conservateur, en raison de cet enracinement même. Par la suite, il devient pour son pays le meilleur théoricien de la tendance Tory, dont il accompagne l’évolution illibérale : les valeurs Tory ont été trahies par les tenants du marché-libre, dit-il dans Meaning of Conservatism (1980). Le combat des conservateurs pour la liberté a été nécessaire face à la gauche marxiste et marxisante, et c’est pourquoi Roger a travaillé en Tchécoslovaquie avant la chute du mur pour aider les universités clandestines. Mais le combat des conservateurs pour assigner des limites à la liberté devient crucial face au progressisme mondialiste, et Roger devient ces dernières années l’une des têtes de file de la Société Vanenburg, Center for European Renewal, regroupement des intellectuels conservateurs européens, critiques des institutions européennes. Ses ouvrages ouvrent des voies dans tous les domaines, avec des travaux pionniers sur l’esthétique et l’écologie considérées d’un point de vue conservateur”.
Chantal Delsol, membre du comité de patronage du Pont-Neuf