Frédéric Rouvillois, délégué général de la Fondation du Pont-Neuf et auteur, avec Christophe Boutin de la note Un trou noir démocratique : ce que nous dit la Convention citoyenne pour le climat, revient pour Valeurs actuelles sur le naufrage d’une initiative bancale juridiquement qui a fini par se retourner contre Emmanuel Macron qui doit recevoir aujourd’hui les 150 membres de cette convention.
En juin dernier, le dossier de présentation de la Convention citoyenne pour le climat présentait cette dernière comme un exercice inédit de « démocratie augmentée », permettant de surmonter les tentations populistes tout en rajeunissant, par la transfusion du sang neuf de la société civile, une démocratie représentative vieillissante et décrédibilisée. Un an plus tôt, le 25 avril 2019, en lançant cette expérience décrite comme un tournant démocratique sans précédent, le président Macron avait promis d’en assumer par avance toutes les conséquences et tous les risques : « ce qui sortira de cette convention, je m’y engage, sera soumis sans filtre, soit au vote du Parlement, soit à référendum, soit à l’application réglementaire directe ». Promesse réitérée le 29 juin 2020 devant les « 150 citoyens » tirés au sort réunis dans les jardins de l’Élysée : « Je vous confirme (…) que j’irai jusqu’au bout de ce contrat moral qui nous lie en transmettant la totalité de vos propositions, à l’exception de trois d’entre elles ».
Ce jour paraît ainsi la consécration tant attendue de la démocratie participative ; pourtant, on décèle déjà, ça et là, quelques notes discordantes, la tonalité autocratique d’un propos employant systématiquement la première personne du singulier, ou le fait que le Président s’est arrogé souverainement un droit de veto non prévu dans le « contrat moral », les fameux « jokers », qu’il déclare sur un ton complice mais sans réplique avoir décidé de ne pas transmettre. Cependant, ce 29 juin est jour de fête, et les petites déceptions sont estompées par le soulagement de voir reprises toutes les autres propositions : « je m’y étais engagé, je tiens parole, 146 propositions sur les 149 que vous avez formulées seront transmises soit au gouvernement, soit au Parlement, soit au peuple français. »
Mais l’été n’est pas encore fini que déjà, la liste des « jokers » s’allonge, et que l’on commence à parler de « détricotage » – surtout lorsque celui-ci prend des formes décomplexées, comme le 14 septembre, quand le président Macron ajoute à la liste le moratoire sur la 5 G, profitant de l’occasion pour ironiser sur le retour à la lampe à huile et un « modèle Amish » incapable de « régler les défis de l’écologie contemporaine ». Du côté des « 150 », les visages se crispent. Le 12 octobre, les anciens de la Convention envoient au président une lettre faisant état de leurs préoccupations ; certains, comme le « garant » Cyril Dion, vont jusqu’à exiger dans la presse le respect de la parole donnée. Et c’est alors que le président, au cours du long entretien qu’il donne le 4 décembre au média en ligne Brut, va procéder à un recadrage en règle, qui présente en outre l’intérêt de confirmer la faible consistance de la prétendue « démocratie augmentée ».
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