L’ancrage de la droite dans le conservatisme imposerait à une droite politiquement ambitieuse et audacieuse un effort intellectuel, afin de reconstruire sur cette base un discours politique cohérent, et dans le prolongement de celui-ci, d’élaborer un programme à la fois clair et séduisant. L’objectif serait ainsi qu’au terme d’un effort soutenu poursuivi sur deux à quatre ans, la droite puisse se réclamer consciemment et fièrement du conservatisme – et non plus subir ce mot comme un boulet, un piège ou un boomerang.
Dans cette stratégie de renversement du jeu, l’effort consisterait, en parallèle, à critiquer sur le fond la notion de « progressisme », dont se réclament La République En Marche et le président Macron. À ce propos, on peut partir du mot lui-même, et souligner par exemple que le conservateur, s’il ne récuse évidemment pas « les progrès » qui peuvent se réaliser dans tel ou tel domaine, ni leur caractère bénéfique et souhaitable, n’adhère pas, en revanche, à la religion ou au mythe du Progrès qui définit le progressisme. Un mythe qui, au cours de l’histoire récente, s’est avéré cruellement trompeur, et potentiellement dangereux – en ce qu’il se trouve à l’origine, non seulement des principaux systèmes totalitaires du XXe siècle, mais également, d’une confiance illimitée dans la raison individuelle, qui a engendré aussi bien les dérapages de l’ultralibéralisme, que les agressions les plus délibérés infligées à la nature et à l’environnement.
En somme, à travers le mot que Macron s’est choisi lui-même pour étendard, le travail consisterait à dévoiler, précisément et minutieusement, la marchandise que recouvre ce pavillon de complaisance. Au total, il s’agirait donc, dans cette guerre des mots, de reprendre la dichotomie imposée par Emmanuel Macron, dès lors qu’on ne peut faire autrement, mais en vue d’en inverser le sens. Et au-delà, de s’en servir comme de l’instrument le plus approprié pour réunir la droite.