Le progressisme saint-simonien à la Macron, soucieux de ne pas prendre l’opinion publique à rebrousse-poil, n’hésite pas à développer un discours écologique que l’on serait presque tenté de croire sincère – mais qui s’avère très largement factice, comme on peut s’en apercevoir dans les faits, dès lors que le thème de la « croissance » demeure un principe et une idole intangibles : l’écologie intégrale, pour reprendre la notion développée par le pape François dans l’encyclique Laudato Si, est incompatible avec cette approche ultra-libérale et post-démocratique.
Fidèle à l’inspiration saint-simonienne, cet ultra libéralisme est essentiellement d’ordre sociétal : selon lui, il n’existe aucune limite, notamment d’ordre anthropologique, à la libre décision des individus, sinon leur volonté même, exprimée sur un mode contractuel. De ce point de vue, PMA et GPA ne sont donc que les prolongements logiques du « mariage pour tous », et l’annonce des mutations suivantes. Selon cette logique également, la famille, structure archaïque s’il en est, n’a aucune valeur propre: l’une des conséquences, déjà mise en avant par les saint-simoniens, étant, à terme, la suppression de la transmission héréditaire du patrimoine – seule limite significative à cet ultra libéralisme, qui montre du coup à quel point il s’éloigne du libéralisme mesuré avec lequel s’accordent la plupart des conservateurs. Sur un autre plan, ce progressisme aboutit à ce qu’on pourrait appeler la « post-démocratie » : au nom d’une certaine vision de la rationalité, le courant progressiste se méfie des manifestations intempestives du peuple, des risques du suffrage universel, et plus encore, de la démocratie directe. Au XIXe siècle, Saint-Simon, l’Inspirateur, plaidait pour un système où « les intérêts généraux seraient dirigés par les hommes les plus capables (…) : système social le meilleur auquel l’espèce humaine puisse atteindre. » La seule forme politique légitime, c’est le gouvernement des experts et des techniciens, la démocratie ne servant que d’enrobage superficiel destiné à satisfaire ceux qui acceptent d’être dupés. Quant au chef de l’État, il incarne au plus haut degré cette excellence technicienne : il est l’ultime bête à concours, le « premier de la classe » absolu, comme le président Macron semble avoir voulu le montrer in vivo en participant directement à quelques représentations du « grand débat national ».