L’anticommunisme a joué, depuis la révolution d’Octobre, un rôle décisif dans la mobilisation des conservatismes, dans leurs succès intellectuels et électoraux. Depuis 1990, cependant, toute cette construction s’est effondrée, aussi subitement que le Mur : ce qui a obligé les conservateurs à recentrer leurs réflexions et leurs combats, retrouvant du coup certaines questions que l’urgence du combat anticommuniste avait longtemps contraint à délaisser. Depuis, le communisme ne ressemble plus à rien, sinon, dans quelques contrées exotiques, à une caricature exagérée de ce que décrivaient ses ennemis. Quant aux partis communistes des pays occidentaux, ils ne survivent à leur très grand âge qu’à coup de perfusions et paraissent avoir tout oublié de l’orthodoxie d’antan. En revanche, les marxismes et les post-marxismes sont loin d’être morts : portés par des intellectuels souvent brillants ( Abensour, Badiou, Zizek), ils sont les premier à se revendiquer de la tradition utopique, ce qui leur permet, sur un plan théorique, de se délester de 70 ans d’expériences désastreuses et de dérives despotiques. Et ce faisant, d’en ressortir ragaillardis, prêts à fournir en arguments et en rigueur dialectique les nouvelles radicalités. Tout en entreprenant de contester ou de dissimuler, avec  beaucoup de conviction et plus de moins de succès, la dimension  virtuellement  mais nécessairement totalitaire de toute utopie.